• Conférence / Débat

Populations ultramarines et discriminations en France

le 13 mars 2023

13h-15h
Les questions des discriminations raciales et de genre envers les populations ultramarines françaises en métropole et dans les Outre-mer français seront abordées dans cette intervention en les inscrivant dans une réflexion élargie sur la situation postcoloniale de ces territoires restés rattachés à la République française après les indépendances.

La question du devenir des anciens sujets coloniaux racisés ayant accédé au statut de citoyens-nationaux – et de leur rapport à l’Etat – est en effet au cœur de réflexions collectives renouvelées depuis le début des années 2000. Après avoir présenté les principaux enseignements de ces travaux, cette intervention placera la focale sur les recherches traitant des relations que les personnes qui se définissent comme des gens du cru (tels les Mahoraises et Mahorais français à Mayotte) entretiennent avec celles et ceux qui sont définis comme des gens d’ailleurs, étrangers originaires de territoires voisins devenus indépendants ou bien Français originaires de l’ancienne métropole coloniale. Dans le département français de Mayotte, on retrouve dans la presse, parmi les élues et élus, dans les manifestations, dans les rapports de voisinage comme dans les interactions au guichet, des discours publics axés sur la « menace d’invasion » ou de « substitution de la population originelle » autochtone que représenteraient les migrantes et migrants comoriens originaires de l’autre côté d’une frontière internationale toujours plus dangereuse à franchir et toujours aussi poreuse. En Guyane, le legs de l’histoire du marronnage et la vie sociale dense qui s’organise de part et d’autre de la frontière que constitue le fleuve Maroni font que les distinctions parmi les Bushinengués n’apparaissent pas marquées par une altérisation aussi forte. Dans tous les cas, une perspective intersectionnelle permet d’éclairer d’un jour nouveau ces débats. En effet, les discours sur la menace que constitueraient les étrangers et les discriminations qui les accompagnent en pratique, visent principalement les femmes migrantes. Les Anjouanaises, les Bushinenguées du Suriname ou les Haïtiennes sont accusées de venir « prendre les hommes » pour « faire des enfants français » – et obtenir ainsi des papiers. Ces discours d’altérisation ne peuvent pas s’interpréter comme un contentieux isolé entre les groupes minoritaires : ils opèrent systématiquement en référence à l’État central, aux fonctionnaires, aux métropolitains blancs, à l’histoire coloniale française et à l’incertitude de l’inclusion pleine et entière des gens du cru dans la nation française. Sans perdre de vue la relation asymétrique entre majoritaire et minoritaire, il importe donc d’investiguer la pluralité des situations minoritaires et les dominations enchâssées qui les caractérisent pour saisir les logiques discriminatoires à l’œuvre dans toute leur complexité. 

 

Intervenante : 

  • Élise Palomares, Maîtresse de conférences HDR en socio-anthropologie, Université de Rouen, Dysolab

 

Modératrice et modérateur : 

  • Marine Bourgeois, Maîtresse de conférences en science politique, Sciences Po Grenoble-UGA, PACTE

  • Guillaume Roux, Chargé de recherche en science politique, FNSP, Sciences Po Grenoble-UGA, PACTE

Publié le 10 mars 2023

Informations pratiques

Lieu(x)


Sciences Po Grenoble-UGA, Amphi A